Choses vecues Choses lues

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Serpentine – Mélanie Fazi

Serpentine est un voyage de dix nouvelles fantastiques, mais néanmoins proches,

parfois dérangeantes. Ici, les blessures et les fascinations de l’enfance et de

l’adolescence reviennent nous démanger, et la mort est toujours présente, si

proche qu’on peut sentir son souffle dans notre cou. Car Serpentine est un recueil

de nouvelles qu’on ressent dans sa chair.

 

Mélanie Fazi nous fait lire, voir, entendre, sentir parfois même goûter ses textes

(« Mémoire des herbes aromatiques »), et notamment avec « Matilda », une

nouvelle extraordinaire dans laquelle tous les sens fonctionnent à plein. C’est

l’évocation intense, dans la peau d’une fan, de tous les instants d’un concert de

rock inoubliable.

 

« Sa voix qui vous pénètre comme un couteau, qui s’insinue jusque dans vos os.

Une main qui essaie d’agripper vos entrailles pour vous retourner comme un gant.»

 

« Là où je me tiens, je distingue les veines apparentes sur le dos de la main qui

agrippe le pied de micro étincelant. Le vernis d’un blanc bleuté au bout de ses

doigts. Les reflets bleu néon des projecteurs sur la bague qu’elle porte au majeur

droit.
Je suis dans l’instant. »

 

Ce recueil contient beaucoup d’autres grands moments, qui font mentir tous ceux

qui pourraient oser penser que la nouvelle est un genre inférieur – « Elégie », la

supplication d’une mère à un arbre pour que celui-ci lui rende ses jumeaux

disparus, « Nous reprendre à la route », le destin d’une voyageuse oubliée sur

une aire d’autoroute, et encore « Rêves de cendre », dans laquelle une enfant

joue avec le feu.

 

« Mais pour chacune sifflant à mes oreilles, je regarde l’asphalte et l’imagine qui

me râpe la peau des bras et des jambes, la peau des joues, dénude les os. Qui

brise les membres, défonce les crânes. Ecorche le cuir chevelu. Et conserve ce

sang versé en offrande à un dieu de notre temps. Mère autoroute, père asphalte,

protégez les pauvres voyageurs. Un goût de panique me remonte au fond de la

gorge, âcre et cuivré. » (Nous reprendre à la route)

 



03/07/2012
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