Le cheval impossible - Saki
Héritières des suffragettes, amoureux du genre humain, laissez tomber vos nobles
pensées pendant le temps de cette lecture, afin de profiter pleinement de la
misanthropie mordante et de toute la drôlerie de Saki.
Auteur britannique né en 1870, qui perdit très tôt sa mère et fut élevé par deux
tantes, Saki en conçut apparemment une image des femmes très influencée par
l’éducation reçue de ces deux femmes acariâtres et prises dans des disputes
constantes.
« La main qui balance le berceau balance aussi le monde, mais comme le ferait
un volcan. Une femme pourra endurer beaucoup d’inconfort, se sacrifier et se
passer de tout jusqu'à l’héroïsme, mais le seul luxe qui lui soit indispensable,
ce sont les disputes. Partout, si transitoire que soit l’événement, elle ne renoncera
jamais à ses querelles féminines, pas plus qu’un Français ne renoncerait à mitonner
sa soupe dans le désert des régions arctiques. » (Excepté Mrs. Pentherby)
Tout ceci n’enlève rien à son humour corrosif, bien au contraire. Une quarantaine
de récits courts, de trois à dix pages environ, forment ce cheval impossible, et
Saki nous y plonge avec cynisme et sans pitié dans l’atmosphère de la haute
société de l’Angleterre Edouardienne.
Parmi les perles qui m’ont arraché un éclat de rire sonore (ceux qui me connaissent
apprécieront), je retiens surtout … le cheval impossible [un cheval impossible
finalement vendu au meilleur prétendant de la fille de la famille au risque de tuer
celui-ci et d’anéantir ainsi les perspectives cette alliance prometteuse], … la louve
[un homme qui prétend maitriser des forces occultes, la Magie Sibérienne, tourné
en ridicule lors d’un diner mondain] … et bien sûr Louis [un adorable loulou de
Pomeranie qui sert d’alibi à Mme Strudwarden, pour ne pas céder d’un pouce sur
toutes les propositions de son époux qui ne lui conviennent pas, donnant à celui-ci
des envies de meurtre canin].
«- Ecoute-moi, dit Strudwarden, cette éternelle question de Louis devient un
problème ridicule. On ne peut rien faire, rien prévoir sans encourir un quelconque
veto imposé par le confort ou les caprices de cet animal. Si tu étais un prêtre au
service de quelque fétiche africain, tu n’arriverais pas à établir un code d’interdiction
plus compliqué. Je crois que tu demanderais au gouvernement de repousser les
élections législatives si tu pensais que le confort de Louis devait en souffrir si peu
que ce soit.»
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