La trilogie babylonienne - Sebastien Doubinsky
La trilogie babylonienne est un assemblage de trois romans frères ; ils
se déroulent tous dans une cité imaginaire nommée Babylone, une cité
dont les dérives vont en s’amplifiant mais qui ressemble néanmoins
beaucoup aux nôtres.
La première partie, « La naissance de la télévision selon le bouddha »,
forme une mosaïque de very Short cuts autour des personnages de
l’infatigable journaliste TV Sheryl Boncoeur, prête à prendre tous les
risques pour alimenter un voyeurisme extrême, de son caméraman Bill
qui finira la gorge traversée par une balle explosive, de Lee Jones,
écrivain incompris qui finalement rencontre le succès tout en restant
incompris, et du sergent américain Steve Kerinsky, qui essaie de donner
un sens à une guerre absurde en comptant les corps, la durée des missions,
la distance des cibles, bref, tout ce qui peut être compté.
Dans « Taureau jaune », la cité qui est maintenant minée par les gangs et
par une violence sans cesse croissante. Là, le commissaire Georg Ratner, habité
par l’amour de sa femme qui se trouve dans un coma végétatif et le désir
pour sa maîtresse, tente sans conviction de retrouver un tueur en série, avec
les rêves pour ultime recours.
Enfin, dans « Les Jardins de Babylone », les autorités ont légalisé le crime
sous contrat, pour tenter d’endiguer la violence et pour équilibrer les finances
de la cité. En contrepartie de leurs crimes, les assassins légaux peuvent
avoir le privilège de voir leurs livres publiés. On croise ici un assassin légal,
un écrivain « subversif » auteur d’un best-seller clandestin, et la compagne
junkie d’un poète génial mort d’une overdose avant la consécration de voir son
nom imprimé sur un livre.
La Trilogie babylonienne forme un kaléidoscope fluide, un puzzle violent à
caractère prophétique. Avec les correspondances tout au long du roman, une
toile de fils ténus mais solides se tisse, pour former un tout très nettement
supérieur à la somme de ses trois parties.
« Quelque chose claqua à l’intérieur de Sheryl.
Ses mots se mélangèrent à la salive de sa langue, et sortirent de ses
mâchoires serrées en une mélodie improbable. Elle ramassa la camera
poisseuse de sang mais qui marchait toujours, et se mit à parcourir
ce chaos, filmant sans discontinuer. La petite lumière rouge était son étoile
du berger, la guidant à travers ce dédale obscur de violence et de folie.
C’était là la seule lumière qu’elle voyait.
Lorsque les hélicoptères de secours atterrirent enfin, elle filmait toujours,
entourée d’un monceau de cadavres qui l’avait miraculeusement protégée
des balles et des éclats d’obus. Elle chantait pour elle-même un air
qu’aucun des infirmiers ne put reconnaître.»
A découvrir aussi
Inscrivez-vous au blog
Soyez prévenu par email des prochaines mises à jour
Rejoignez les 2 autres membres