Lanark - Alasdair Gray
Lanark est un monde, un livre qui se voit autant qu'il se lit, une tour de
Babel de styles et d'émotions, un livre alternativement passionnant,
désespérant, déroutant et fascinant.
Extrait de l'épilogue - rencontre entre Lanark et son auteur :
«- Quand Lanark sera terminé (je donne votre nom à l’œuvre), il
comportera grosso modo deux cent mille mots et quarante chapitres,
et il sera divisé en livres Trois, Un, Deux et Quatre.
- Pourquoi pas Un, Deux, Trois et Quatre ?
- Je veux que Lanark soit lu dans un certain ordre, mais en fin de
compte, pensé dans un autre. C'est une vieille technique. Homère,
Virgile, Milton et Scott Fitzgerald l'ont utilisée. Il y aura également
un prologue avant le Livre Un, un interlude au centre et un épilogue
deux ou trois chapitres avant la fin. »
Débutant et concluant (presque) le roman, les livres Trois et Quatre
racontent donc l'histoire d'un homme nommé Lanark, tentant de
vivre dans une civilisation qui s'effondre.
Lanark est un homme à part, un être incompréhensible et incompris,
en particulier du fait de son amnésie. Il a du mal à saisir le monde,
le temps, les relations, les objets et ses propres sensations.
Lanark vit en guettant la lumière à Unthank, une évolution lugubre
et kafkaïenne de Glasgow, une ville dans laquelle le soleil ne brille
que deux à trois minutes par jour et dont les habitants sont atteints
de maladies fantastiques mais mortelles, « peau de dragon, bouches,
mollesses ou rigidité gazouillante ». En voulant échapper à son sort,
Lanark passe dans une autre dimension et se retrouve dans un
gigantesque Institut, dédale fantasmagorique où l'on fait quelques
tentatives pour guérir ces affections bizarres.
Le livre Quatre raconte la sortie de cette dimension, le chemin du
retour de Lanark à Unthank. Manipulé, il va tenter de sauver sa
famille et sa ville, qui risque d'être engloutie par la cupidité de la
« créature et de ses organes», métaphore goulue du capitalisme
dominant.
Les livres Un et Deux – au centre du roman - sont l'enfance et la
jeunesse de Duncan Thaw, racontés par un oracle à Lanark comme
étant sa propre histoire. Duncan Thaw rêve d'être reconnu comme
un artiste génial, fantasme dont il s'approche de manière fugace ;
mais, handicapé par son incapacité à ressentir les émotions, à aimer
et être aimé, il va échouer et sombrer.
« Le chagrin tiraillait un coin presque inconscient de son esprit, tel
un chiot essayant d'attirer l'attention de son maître en tirant le bas
de son manteau. »
Dans l'épilogue de Lanark, épilogue brillant et drôle finalement
situé quatre chapitres avant la fin, Lanark rencontre son auteur
qui lui donne des clés de ce livre, tout en livrant un index des
plagiats « diffus et enchâssés », des « notes critiques qui
épargneront aux chercheurs universitaires des années de labeur ».
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