Choses vecues Choses lues

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Moi, Jean Gabin - Goliarda Sapienza

"Se tenir toujours accroché au rêve, et défier jusqu'à la mort pour ne jamais le perdre."

 

Goliarda Sapienza est née en 1924 à Catane, en Sicile. Sa mère, syndicaliste et

journaliste, et son père avocat étaient des socialistes (mais de vrais socialistes,

pas la version édulcorée de 2012) et militants antifascistes. Ils avaient aussi

des enfants de leur précédente union formant ainsi une famille recomposée

avant l’heure, comme une très grande tribu.

 

Croiser une voix authentique et vraiment nouvelle en littérature est un bonheur,

comme celle de cette petite fille qui se prend pour Jean Gabin. Dans ce livre

retraçant ses années d’enfance dans les ruelles animées de Catane, on

rencontre cette môme au grand cœur, avide de connaissances, modelant

son comportement et ses actions sur la famille de seigneurs dans laquelle

elle vit – modèles d’intégrité et de courage, n’abandonnant jamais la rébellion

contre la loi du plus fort - ses parents, son oncle et ses demi-frères qui ne

remplissent pas leur rôle de frères à moitié, au milieu de la répression et

des intimidations des fascistes au pouvoir.

 

Les modèles de Goliarda se cristallisent dans la personne de Jean Gabin,

archétype du seigneur, et elle revoit sans relâche ses films pour s’imprégner

de lui. Elle rêve de devenir lui, d’avoir sa vie et mesure chacun de ses actes 

à l’aulne de ce que lui aurait fait : Gabin aurait-il eu assez d’argent pour se

payer un avocat ? Gabin était-il athée ? Gabin se serait-il abaissé à des

chamailleries avec une femmelette ? ...

 

“Ses yeux bleus – ceux de Jean, bien sûr – rêvaient d’une femme qui serait

comme un fleuve, un grand fleuve languide et vertigineux s’en allant nourrir

la mer de ses eaux limpides. Voilà ce que j’ai appris de lui, et pour moi la

femme a toujours été la mer. Entendons-nous, pas une mer dans un

élégant cadre doré pour fanatiques du paysage, mais la mer secrète de

la vie : aventure magnifique ou désespérée, cercueil et berceau, sibylle

muette et sûre réponse, espace immense où mesurer notre courage

d’individualistes endurcis, à nous, voleurs du riche et bienfaiteurs du

pauvre, d’accord sur une phrase brève et précise : « Toujours en dehors

de tous les pouvoirs établis » ; seuls, mais avec l’orgueil de connaître la

rectitude propre aux outsiders."

 

Un livre pour ne jamais oublier ce qu’est un idéal.



06/12/2012
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