Rimbaud le fils - Pierre Michon
Faulkner, cité par Pierre Michon dans « Le Roi vient quand il veut », disait
que nous disposons tous d’un territoire pas plus grand qu’un timbre poste,
et que ce qui importe ce n’est pas sa superficie mais la profondeur à laquelle
on le creuse.
« Rimbaud le fils », texte publié en 1991, année du centenaire de la disparition
d’Arthur Rimbaud, a la profondeur de la poésie, comme « une paysanne noire
qui creuse un trou où la langue démesurément s’engouffre et vibre ».
Sous forme de biographie intime, Pierre Michon tente d’approcher Rimbaud
à partir des textes et des traces, de conjectures sur le père absent, sur la mère,
femme souffrante et intraitable, et par les portraits de ceux qui l’ont côtoyé,
Izambard, Banville et Verlaine.
C’est un questionnement sur la filiation de Rimbaud, celle de l’enfant entre
détestation et amour de l’ombre du père et de la mère vouée au noir, et la
filiation de ses ancêtres Virgile, Malherbe et Racine, Hugo, « étoiles lointaines
dans la nuit des collèges ».
Détours du récit et hésitations des « on dit que » racontent l’incertitude
devant le mystère de la création, le propre désir d’écriture de Pierre Michon,
la prétention et questionnement de l’écrivain qui entend dédier son texte
au plus haut.
« La maison est plus noire que la nuit. Ah c’est peut-être de t’avoir enfin rejointe
et te tenir embrassée, mère qui ne me lis pas, qui dors à poings fermés dans le
puits de ta chambre, mère, pour qui j’invente cette langue de bois au plus près
de ton deuil ineffable, de ta clôture sans issue. C’est que j’enfle ma voix pour
te parler de très loin, père qui ne me parleras jamais. Qu’est ce qui relance sans
fin la littérature ? Qu’est-ce qui fait écrire les hommes ? Les autres hommes,
leur mère, les étoiles ou les vieilles choses énormes, Dieu, la langue ? »
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