Le onzième pion - Heinrich Steinfest
Le onzième pion a un « happy beginning ». Georg Stransky, son héros, a toutes
les raisons d'être heureux : une femme belle, intelligente, combinant avec grâce
une réussite professionnelle éclatante et des talents de cuisinière, une fille charmante
et une villa confortable aménagée avec goût.
Tout va donc pour le mieux jusqu'au soir où une pomme traverse la fenêtre de sa
maison et où Stransky reçoit par un coup de fil l'injonction de croquer la pomme.
Le lendemain matin, il a disparu.
Lilli Steinbeck entre alors en scène pour conduire l'enquête et retrouver Stransky.
Dans l'excellent « Requins d'eau douce » de Steinfest, l'inspecteur Lukastik se
référait à son Tractatus de Wittgenstein lorsqu'il était en panne d'inspiration. Ici,
Lilli Steinbeck fait confiance à son pif, et elle a vraiment le nez creux. Il faut dire
que celui-ci est à la fois spectaculairement déformé et le point d'ancrage de sa
personnalité très frappante.
Au cours de cette enquête policière surréaliste, de cette satire ponctuée de scènes
loufoques et de réflexions métaphysiques, Lilli Steinbeck, en compagnie d'un équipier
improbable, un détective grec au physique de baleine essoufflée, voyage autour du
monde, à Athènes, au Yémen, à l'île Maurice, pour damer le pion à l'autre camp et
ramener Stransky sain et sauf chez lui, tout en tentant de construire sa propre vie.
« Le onzième pion » est une lecture jubilatoire, et pas seulement pour l'intrigue, qui à
un certain stade devient presque accessoire, mais pour la distinction des dialogues,
la description au scanner de ces personnages bizarres, incroyablement attachants ou
repoussants, pour toutes les réflexions, digressions et miroirs de notre monde que
cette intrigue nous adresse.
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